« DANSE ET HISTOIRE DES ARTS »
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L’association Passeurs de danse a organisé son deuxième stage national à Caen, du 29 au 31 octobre, sur le thème « la leçon de danse en question(s) ». Selon l’approche et l’éthique des Passeurs, l’enjeu était de croiser les regards sur cet objet singulier pluriel qu’est la leçon de danse en différents contextes.
Une douzaine d’intervenants ont apporté leurs éclairages spécifiques, en tant que professeur d’université, du second degré, formateur, conseiller pédagogique, inspecteur ou danseur professionnel. Chacun a fait vivre une dimension particulière de la leçon de danse à travers un temps de pratique et/ou une communication orale.
Betty Mercier-Lefèvre donna le ton en ouvrant le stage par une expérimentation et une réflexion sur « l’atelier », à la fois lieu de fabrique chorégraphique, méthode de création et processus de recherche sur soi. Conçu comme un temps particulier, celui des échappées avec les règles, celui du risque de se perdre, de ne pas savoir, celui des dérives et des marges qui nous inventent, l’atelier (re)mit résolument la leçon de danse en question(s).
Le chantier ainsi ouvert fut ensuite nourri de la très sensible proposition de Joce Caumeil qui fit traverser aux stagiaires une expérience de la danse comme pratique qui relie le mouvement et son ressenti, le geste et la sensation, la forme et le sens. Attentif à la respiration, chacun développa son mouvement poétique pour ensuite le faire dialoguer en duo, tandis que sa communication mettait cette approche en perspective pour faire advenir le sujet à travers sa propre production personnelle en milieu scolaire.
Ève Comandé poursuivit en interrogeant les pratiques langagières de l’enseignant dans la transmission de la danse. Mettant en parallèle la symbolisation à l’œuvre dans le processus de construction du geste dansé et dans l’énoncé de consignes verbales, elle montra que le langage du professeur se caractérise par une dynamique d’invention poétique afin de favoriser l’acte créatif chez l’élève.
Vincent Vergne releva quant à lui le défi d’interroger la façon dont la leçon peut inviter, dialoguer, s’appuyer sur des références artistiques. Son atelier de pratique mit les stagiaires en situation de vivre le processus de création ayant abouti à la chorégraphie « Décomposition » d’Emmanuelle Vo Dinh, dont un extrait filmique fut ensuite visionné.
Ayant ouvert la question du rapport au patrimoine, le parcours se poursuivit avec Dominique Jegou, ex danseur de la compagnie Bagouet. En appui sur des partitions originelles de la pièce « So Schnell », il proposa l’apprentissage d’uns extrait adapté, confrontant les stagiaires à la précision de l’écriture qui caractérise l’univers de ce chorégraphe majeur de la danse contemporaine française.
Le contexte de la leçon de danse en maternelle plaça Dominique Vernet en situation d’établir des ponts, d’identifier les fondements à construire chez les élèves de 4-5 ans. Passer du faire à l’apprendre et au réussir et comprendre, c’est concevoir la leçon de danse comme l’instrument d’une réelle opportunité d’expérience artistique, et par là-même comme un moyen pour les élèves de traverser d’autres arts.
La spécificité des publics et des lieux d’enseignement fut ensuite déclinée par Laurent Pejou qui fit toute la lumière sur la leçon de danse dans le programme « Dix mois d’école et d’opéra ». Partenariat d’exception entre l’éducation nationale (académies de Paris, Versailles et Créteil) et l’Opéra national de Paris, ce programme unique propose aux élèves scolarisés en éducation prioritaire d’ouvrir les portes de l’Opéra, à travers des ateliers de pratique artistique et des ateliers du regard pour des apprentissages nouveaux engageant les élèves sur le chemin de la réussite.
Plongeant au cœur des mécanismes de la transmission dans le contexte ordinaire de la leçon de danse en EPS, Géraldine Schoehner et Marielle Brun montrèrent, en appui sur l’analyse d’une séquence vidéo, comment les différents formats pédagogiques utilisés et leur articulation offre des opportunités spécifiques et complémentaires pour faire construire aux élèves les compétences et connaissances attendues en danse.
Le dernier atelier de pratique fut encadré par Mustapha Ziane (danseur de la Cie Fattoumi/Lamoureux). Dans une approche très organique du mouvement, il permit aux stagiaires de revisiter des éléments fondamentaux à travers les appuis, les coordinations, la tactilité pour tisser, dans la sensorialité, les gestuelles individuelles en duo vibrant à l’écoute.
Les corps et les esprits nourris de riches expériences, il fallait penser à conclure.
Anne-Claire Toutain s’y employa en utilisant les pratiques somatiques (relaxation, visualisation, etc.) pour que se déposent avec douceur et tranquillité les traces de cette traversée. Accompagnés avec habileté dans la reprise de contact avec soi-même, l’espace environnant et les autres, les stagiaires pouvaient poursuivre leur histoire.
Michèle Métoudi offrit le dernier cadeau avec une synthèse des problématiques soulevées, des paradoxes et des richesses de la leçon de danse. Celle-ci compose en effet avec les mots qu’elle n’a souvent pas, les gestes à inventer et les regards à construire.
Tout au long du stage, l’équipe des Passeurs a gardé une pensée amicale pour Hélène Brunaux et Thierry Tribalat que des raisons de santé ont empêché d’intervenir.
Si l’empreinte de la leçon de danse convoque la mémoire phénoménale, il semblerait que ce stage constituera une expérience marquante pour les trente participants et les intervenants par l’intensité du partage, ouvrant sur de nouvelles perspectives.
Parmi celles-ci, outre les très belles rencontres que chacun aura pu faire pendant ces trois jours, l’association poursuit le chantier autour de « la leçon de danse » par l’écriture d’un ouvrage collectif co-édité avec le CNDP dans lequel les interventions présentées seront formalisées et auxquels viendront s’ajouter d’autres contributions.
L’association tient ainsi à remercier l’ensemble des intervenants, des participants ainsi que la directrice de l’UFRSTAPS de Caen pour son accueil dans ces lieux de lumière et d’ouverture que représente le COSEC du campus 2 de l’Université de Basse-Normandie.
Passeurs de danse remercie également tout particulièrement les éditions de la Revue EPS qui ont offert à chaque participant un exemplaire du n°348 contenant le dossier “Danse, arts, culture.”