Chloé D. pour Passeurs de danse : Dans ton parcours personnel de danse, comment le terme « passeur de danse » résonne-t-il en toi ?
Wilfride PIOLLET : Il résonne profondément car j’ai toujours pensé, depuis toute petite, que quand j’apprenais quelque chose, je ne le savais vraiment que quand je le partageais. D’ailleurs, chez Irène Popard, j’allais facilement vers une copine pour lui expliquer ce que l’on venait d’apprendre, et je sentais qu’il se passait quelque chose, qu’un degré était franchi. Dans le corps de ballet, c’était la même chose, cela me plaisait d’avoir une amie à qui faire comprendre ce que je venais d’apprendre. Avec mon mari, mon fils aussi.
Je ne sais pas si c’est ce qu’on appelle la fibre pédagogique, mais tant que je n’avais pas communiqué ce que je venais d’apprendre, j’avais l’impression que je ne le savais pas.
C’est quelque chose de totalement naturel pour moi et d’intimement lié à la danse. Je sais qu’il y a toujours une possibilité de traduire pour l’autre ce que je viens de comprendre. Si cela ne peut se faire, c’est horrible, c’est-à-dire que j’ai l’impression d’étouffer.
Chloé D. pour Passeurs de danse : C’est donc pour toi une nécessité ?
Wilfride PIOLLET : Voilà, oui, c’est une nécessité. C’est un équilibre pour moi, c’est quelque chose qui m’a posé mille questions, et notamment celle de la comparaison des savoirs. Donner, c’est aussi recevoir, car l’autre réagit, et souvent, vous éclaire par ses réactions.
Autrement dit, en tant que professeur, je me suis souvent questionnée sur la nature exacte de ce que je faisais travailler.
En effet, au sujet de la transmission d’un répertoire, je me suis aperçue très vite que l’interprète dépend considérablement du répétiteur. Si celui-ci change, on peut se retrouver à travailler complètement autre chose, une autre matière, avec parfois un tout autre esprit, c’est très déstabilisant !
Même dans le cadre du répertoire de Balanchine, il était très fragilisant de constater à quel point nous dépendions de la personne qui nous transmettait le ballet.
Ce qui est d’autant plus perturbant, c’est quand, comme moi, on a travaillé directement avec le maître et qu’après sa disparition, seule compte la voix du répétiteur s’appuyant sur la dernière version (vidéo) en vigueur. Je dirais même que nous n’avions pas le droit de parler de ce que nous avait transmis le maître.
Je me suis donc aperçue, à quel point la danse (et donc le savoir et la responsabilité de l’interprète) est vulnérable. Cela m’a énormément perturbée, pendant longtemps… et encore aujourd’hui !
Chloé D. pour Passeurs de danse : Quelle est la nature de ce que tu t’attaches à passer en danse ?
Wilfride PIOLLET : Quand je suis rentrée au Conservatoire (1), je me suis posé la question de la nature et de l’authenticité de ce que j’allais transmettre. Pour moi, la priorité était d’abord de transmettre le désir de posséder un corps disponible, un esprit ouvert, un instrument vibrant. Et cela, même encore aujourd’hui, c’est un grand combat. Un combat de la même envergure que celui de l’acceptation de la danse contemporaine dans les années 70. Si cela est maintenant résolu, le combat s’est, d’une certaine façon, déplacé dans le monde contemporain, vers la non acceptation du rôle d’interprète, je veux dire par là, de celui qui se transforme et met toute sa passion à changer d’état.
Dans les années 80, les chorégraphes contemporains étaient fascinés par le rôle d’interprète et aussi le mariage possible entre le classique et le contemporain (par exemple, Lucinda Childs, Douglas Dunn, Daniel Larrieu ou encore Andy De Groat s’intéressaient aux pointes). Aujourd’hui, on remarque des chorégraphes qui travaillent avec un danseur qu’ils engagent pour ses qualités parfois « extrêmes » le temps d’une pièce puis, très souvent, ils passent à autre chose, c’est-à-dire à d’autres facilités. Ou bien il y a fort peu d’exigences purement techniques. En tous cas, rares sont ceux qui savent forger un vocabulaire sur lequel s’appuyer dans une leçon.
Alors que la notion d’interprète, pour moi, est une chose très compliquée, avec tout ce que cela sous-tend au niveau de la formation. Pouvoir « tout danser » ne veut rien dire : physiquement c’est peut-être possible mais avoir le profond désir de passer d’une façon d’être, d’un style à un autre, mais laisser des certitudes difficilement acquises pour d’autres façons d’aborder le mouvement, mais s’engager avec gravité dans des aventures épuisantes sans assurance de réussite, tout cela n’est pas simple quand on a un seul corps à sa disposition !
Comprendre l’esprit d’un ballet est un véritable travail ! Cela n’est pas tellement accepté ni compris aussi bien du côté des classiques que du côté des contemporains.
En effet, dans les entraînements classiques d’aujourd’hui, on voit de plus en plus l’influence de la méthode russe de Vaganova. Or, cette méthode vient de l’époque stalinienne, où l’interprète ne dansait la plupart du temps qu’un répertoire restreint, et malgré ses qualités (engagement du corps dans l’espace, mobilité du haut du corps) à mon sens, elle ne prépare pas à la souplesse d’esprit ni à la sensibilité physique exigées par un réel changement de style.
Aujourd’hui, cela se retrouve dans la formation classique où l’on formate les interprètes pour répondre à tel ou tel besoin d’images sans s’intéresser particulièrement à leur donner un point de vue (encore moins le choix) sur ce qu’il leur faut danser.
Or, pour moi, en classique, l’idée est de former un corps résolument contemporain et un esprit capable d’avoir une opinion sur ce qu’il va danser, en symbiose avec son époque.
(1) CNSMDP : Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris
Chloé D. pour Passeurs de danse : En somme, tu cherches à former un interprète curieux, lucide sur ce qu’il apprend.
Wilfride PIOLLET : Oui ! Dans la passation, on doit transmettre l’état d’esprit qui accompagne une danse. Cela est possible, sur le terrain, quand le chorégraphe vous transmet directement son ballet ou qu’il crée sur vous. Mais dès que cela ne se passe pas ainsi, surgit un problème. Voilà pourquoi la comparaison des traces du répertoire, sous quelque forme que ce soit est importante.
Je me suis beaucoup appuyée sur la notation, essentiellement pour l’analyse d’oeuvres, afin de comparer les versions. Il y a très peu d’indications qui concernent l’interprétation. Les danseurs, qui ne travaillent pas sur l’écrit, ont grand besoin de quelque chose de tangible quand ils abordent le répertoire. Ces traces ont une valeur mais cela ne suffit pas. Il faut être créatif pour les lire et surtout pour les faire revivre par la danse. Et cela pose de nombreuses questions. Notamment celle de la légitimité de telle ou telle version. Cela devient facilement une guerre de pouvoir.
Ainsi, la passation est pour moi une véritable dynamique : il faudrait que l’interprète soit animé d’une profonde curiosité, qu’il cherche d’où vient la danse qu’il est en train d’apprendre, où trouver d’autres sources.
Or, malheureusement, aujourd’hui, peu d’artistes interprètes sont curieux. La plupart n’ont pas le temps de rechercher l’origine d’une oeuvre pour s’en inspirer. Et d’ailleurs en auraient-ils le désir que leur vie, trop occupée, ne leur en laisserait pas la possibilité. Et pourtant, à partir du moment où l’on se pose la question de l’origine s’ouvre un vaste champ de questionnements pour un interprète ! Cela relativise aussi l’importance que l’on accorde à ce que l’on croit connaître.
Quand l’interprète a-t-il la liberté d’exprimer réellement ses choix d’artistes ? Pas en cours, ni en répétition (ce n’est pas lui qui choisit la version du Lac des cygnes qu’il préfère, etc.).
Ce qui m’intéresse, c’est justement de donner la liberté au danseur de reconnaître la sensibilité de son corps afin de le rendre créatif même dans les contraintes d’une écriture ou dans le cadre d’une improvisation. Une vraie chorégraphie n’est jamais du « bla bla », c’est toujours une recherche, une expérience charnelle et poétique. D’où l’importance de travailler le répertoire. Or, ce qui est bizarre, aujourd’hui, c’est qu’on ne travaille pas assez et même pas du tout le répertoire dans la classe (hors de rares cours spécifiques).
J’insiste : pour aider un interprète à devenir libre et créatif, autrement dit lucide, cultivé et sensible, il est primordial de lui montrer ce qui rend une version plus riche qu’une autre. Chaque chorégraphie porte en elle un véritable sens et un imaginaire. Il ne s’agit pas de changer les pas pour mieux s’y « installer » mais au contraire de se les approprier en instillant dans les mouvements son ressenti le plus mystérieux.
Au sujet de l’importance du libre arbitre, en ce qui concerne l’interprétation, nous savons qu’au temps de la danse baroque la famille des « pas » fonctionnait en « kit ». En jouant sur la façon d’associer les pas selon l’état d’esprit de la danse (tendre, furieuse, gaie.), par ses choix d’ornementation, on composait sa danse en « kit ». Il était ainsi possible de révéler les rêveries de son tempérament. Au XIX e siècle, un enchaînement d’adages comme le « développé-seconde-passé-arabesque-penché », que nous retrouvons dans la « Sylphide », « Giselle », « La Vivandière » et bien d’autres ballets, se déclinait selon la situation commandée par le livret. Ces pas prenaient un sens différent selon la manière dont les danseurs les abordaient.
Par ailleurs, retrouver l’essence de la danse au travers de pas du XIX e siècle est d’abord une redécouverte des possibilités du corps. Dans l’ancien temps, on se servait des pas, pour affirmer le corps dans toutes ses possibilités émotionnelles et physiques, de la pantomime pour faire comprendre une situation.
Quand, aujourd’hui, les nouvelles versions perdent de leur sens, c’est que la question du contexte originel, du désir des créateurs n’a pas été posée.
Dans la société d’aujourd’hui, le souci permanent est l’image. Cela se retrouve dans les chorégraphies où, dans les sauts par exemple, on ne se préoccupe plus que de l’écart des jambes, non plus du « ballonné » qui pourtant donne à voir la sensation d’élévation. Voilà pourquoi, à mes yeux, il est fondamental de travailler le sentiment profond des mouvements.
Comme une dentelle fine et précieuse, le sens de la danse baroque est donné, dans son extrême précision, par de petites choses délicates. Dans toute l’histoire de la danse, il s’agit d’un corps qui « ressent ». Si on ne trouve pas ce ressenti dans l’interprétation d’un pas, à la leçon ou dans le ballet, ce n’est plus de la danse mais de la belle gymnastique.
« Dès que l’homme veut pénétrer dans les secrets de la nature, où rien n’est secret, où il s’agit seulement de voir, il s’aperçoit que le simple y produit le merveilleux. »
Balzac ( Séraphîta )
Chloé D. pour Passeurs de danse : Qu’est ce qu’on passerait alors, à ton avis, dans les spectacles d’aujourd’hui ?
Wilfride PIOLLET : Des chorégraphes contemporains, Odile Duboc par exemple, montrent dans leurs oeuvres, un certain « état de corps » qui révèle la façon dont le danseur écoute ses perceptions. En classique, c’est tout aussi possible, car il s’agit du même corps, un corps contemporain. Mais la technique des pointes, si difficile, ne permet pas facilement au corps d’être en « sensation ». Heureusement, les ballets romantiques et les grands adages sont l’occasion de cette recherche de sensibilité vécue. Actuellement, l’accent, dans les ballets dits néo-classiques, est mis spécialement sur l’affirmation du geste, les extensions et la vitesse. Pourtant nous savons, depuis Gaston Bachelard, que la poésie naît dans la lenteur. On retrouve ce ressenti, mais au sujet de la chute, dans le travail de Brumachon par exemple. à une certaine époque (autour des années 80), tout le monde chutait et se jetait par terre. Aujourd’hui, les chutes deviennent parfois « académiques », comme peut l’être une arabesque si il n’y a pas de sensibilité dans son exécution ; car même une arabesque peut n’avoir rien à dire ! Si elle n’exprime pas un « aller-vers », un désir intérieur, cela devient un truc gymnique.
J’ai eu récemment une discussion à ce propos à l’INSEP : quelle différence entre le gymnique et l’artistique ?
Un geste est artistique si l’interprète a le temps de s’y incarner, si vivre son mouvement est sa première motivation. La danse est un art spécifique. Si tous les artistes recréent en permanence l’oeuvre qu’ils interprètent, en danse, c’est encore plus prégnant car c’est avec son propre corps que l’on crée le geste.
Comment « construire son instrument » c’est-à-dire comment donner à son corps des qualités « musicales » est un souci pour moi. Pour cela j’ai donné à chaque étage du corps un intérêt particulier et donc mis au point des exercices que j’ai appelés basiques (2), qui développent cette conscience particulière. Il s’agit d’un travail d’entraînement (pour l’endurance, le développement de la sensibilité et la vitesse de pensée.) assimilable à un échauffement. Auparavant, les barres flexibles (3) amènent l’élève à observer les modifications profondes qui apparaissent après une visualisation fine et un laisser-faire de la gravité dans le corps. Elles sont applicables aux exercices basiques. Enfin un travail sur les pas, les variations où l’improvisation projette le danseur dans le royaume de l’expression de soi.
Je trouve cela vraiment enthousiasmant de réveiller le corps avec des moyens contemporains et de s’occuper ensuite de relier cette disponibilité à l’oeuvre de danse.
(2) PIOLLET (W.), Exercices basiques, vidéocassette VHS pal, durée 30 mn, diffusion auteur.
(3) PIOLLET (W.), Les gestes de Lilou : http://www.lesbarresflexibles.net/
Chloé D. pour Passeurs de danse : Comment relies-tu cette disponibilité à l’oeuvre ?
Wilfride PIOLLET : En travaillant le corps dans ses possibilités sensibles et en l’accordant avec ce qui anime un pas de danse. Ce sont de toutes petites pensées en de tous petits instants qui modifient le corps en profondeur.
Tout ce qui existe dans l’oeuvre de danse a une relation avec un sens (qui sont cinq, comme chacun sait. plus l’intuition).
Chloé D. pour Passeurs de danse : A ce propos, tu as très bien défini l’importance de l’authenticité de l’objet enseigné, et quelles relations établis-tu entre l’objet à transmettre, la manière de le passer et le public concerné ?
Wilfride PIOLLET : Par exemple, je me suis rendu compte que mes exercices basiques, même extrêmement simplifiés, étaient très difficiles pour les tous petits, car ils sont trop abstraits. J’ai donc inventé les Gestes de Lilou (4) qui sont des instants volés dans les grands rôles du répertoire, pour eux. Il est primordial de solliciter leur imaginaire et tous les rôles emblématiques des ballets sont de vrais modèles, porteurs d’imaginaire. Cela n’empêche pas de joindre à ces gestes des notions anatomiques qui les amusent beaucoup.
Pour les adolescents, c’est différent. Il leur faut surtout des pas à apprendre, à faire et refaire. Il faut leur « donner à manger » (comme disait Noureev) avant tout. Pour eux, il est indispensable de leur faire pratiquer beaucoup de vocabulaire ; autant que ces pas soient les plus riches possibles. Là aussi des notions d’anatomie doivent compléter cet apprentissage.
Si ces pas sont intelligents, sensibles et aussi excitants, les jeunes danseurs se formeront grâce à eux. Il y a un âge où, vraiment, il faut « y aller ». Plus tard, on reviendra au « placement », qui est un mot ridicule : il vaudrait mieux parler d’ « ajustement ». A la croisée du corps, de la sensibilité et de l’attention ce mot évoque bien davantage le mouvement. Dans la vie d’un danseur la leçon quotidienne est l’occasion de cet incontournable ajustement que l’on pourrait comparer à l’accord pour un instrument.
(4) PIOLLET (W.), Ibidem.
Chloé D. pour Passeurs de danse : Qu’entends-tu exactement par « vrais » pas ?
Wilfride PIOLLET : Ce sont les pas qui ont un état d’esprit distinct, qui sont fondamentalement différents, dans leur temps et la difficulté de leur exécution. Surtout ce sont ceux qui obligent à un imaginaire et un « état » de corps particulier.
Souvent, je constate que dans les cours, les pas proposés ne sont que du « ron-ron». Peu de choses les distinguent. C’était l’inverse dans les cours de Madame Egorova, l’un de mes trois grands professeurs. Le schéma de sa leçon est resté le mien : cinq grands pas dans la leçon, correspondant à cinq états de danse. Un grand adage lyrique, à réaliser au ralenti, sans bravoure apparente, avec toujours un petit moment d’improvisation et accompagné d’une musique poétique. L’accent était mis sur l’expression du haut du corps et elle n’hésitait pas à y faire raconter une histoire malgré l’usage des pas les plus variés dans cette partie de la leçon. Ensuite, les grandes pirouettes « italiennes » et les pirouettes « à la hauteur », incontournables pour acquérir la bravoure et son exaltation. Puis, la petite batterie pour la vitesse des jambes, la vivacité de la mémoire et la joie du rebond, suivie des grands sauts pour la jouissance de l’espace. Et enfin les séries (de pointes, de fouettés, etc.) pour le plaisir de la résistance.
Le vocabulaire du XIX e siècle est un vivier pour cela !
Chloé D. pour Passeurs de danse : Nous avons le sentiment que passer pour toi, c’est un peu éduquer.
Wilfride PIOLLET : J’ai trop vécu de choses pour être sûre de quoique ce soit ! J’ai vu des enthousiasmes se dessécher en trois secondes, ou des gens toujours fermés finir par s’ouvrir un jour. Je n’ai aucune recette pour éduquer !
La transmission n’est pas du tout une voie royale ; simplement, je pense que le véritable passage ne peut venir que de l’élève lui-même et, comme j’en parlais avec mon ami Serge Perrault, c’est l’enthousiasme, de part et d’autre, qui permet la passation.
Une leçon de danse est un endroit de passion (plus que de « passation » !), c’est une priorité dans la vie d’un danseur, c’est une oeuvre en tant que telle. Le spectacle est comme la récompense de cette vie de labeur. Un danseur authentique voit la leçon comme indispensable ; c’est le moment où il se « construit », c’est un espace de créativité où il s’affronte et se confronte à lui-même et il aime ces instants d’efforts « gratuits » qui ne concernent que lui-même.
En somme, ce que j’essaye de faire travailler, c’est cette appartenance à soi-même. Cela s’accompagne d’un savoir laisser-faire, d’un travail sur le temps, sur la confiance en sa propre matière qui donne un sentiment de plénitude.
Un corps dansant, disponible, libre, est celui d’une personne qui peut s’appartenir devant les autres. Habité de façon contradictoire, tout à la fois par un sentiment aigu de lui-même, par une grande distance avec son être et aussi par un profond désir de s’oublier. Les « bêtes de scène » sont ainsi : ils osent vivre intensément les trois mondes dont ils sont composés, celui de la pensée, de la sensibilité et de la corporéité. L’art de Terpsichore est à ce prix et l’histoire de la danse laisse des oeuvres qui sont l’occasion d’épanouissement.